Ce jour-là
Le 19 février 1990 s’ouvre à l’hôtel PLM Aledjo, la Conférence nationale des forces vives du Bénin. Sous la direction de Mgr Isidore De Souza, cette Conférence réussie marque le début de la transition démocratique dans le pays. Le Bénin est alors présenté comme le laboratoire de la démocratie farafinoise en raison des alternances pacifiques qui caractérisent les joutes électorales: Nicéphore Soglo, Kérékou II, Boni Yayi, Patrice Talon. Que reste-t-il des acquis démocratiques au pays de Gbéhanzin et de Bio Guéra, 35 ans après ?
Pour avoir passé trois années de ma vie en terre béninoise entre 2010 et 2013, je peux affirmer que derrière ces alternances pacifiques se cachait ce que Yayi a appelé la » démocratie Nescafé ». Une sorte d’archaïsme du système partisan fait de transhumances, d’arrangements financiers au profit de groupes d’intérêts et au détriment d’une population frappée de paupérisation et baignant dans l’illusion de la liberté d’expression. C’est ce système partisan nébuleux que Patrice Talon a voulu démanteler à son arrivée au pouvoir en 2016.
Sous celui qu’on appelait » la télécommande de Paris », de très belles choses ont été accomplies dans la modernisation de la gouvernance. De moins bonnes aussi. Les libertés individuelles par exemple. La ministre Reckya Madougou, le professeur de droit Joël Aïvo et les anciens soutiens du président Talon n’ont pas leur place en prison.
Patrice Talon a des qualités indéniables de visionnaire pragmatique mais traîne le réflexe d’un homme d’affaires qui veut tout contrôler, et qui déteste qu’on lui dise non. Mes confrères Wilfried Léandre Houngbédji ( porte-parole du gouvernement) et Édouard Loko de la HAAC avalent des couleuvres dans un rôle ingrat qui n’a aucune commune mesure avec la verve critique qu’ils dégagaient 15 ans en arrière.
C’est aussi ça l’usure et l’ivresse du pouvoir. Tant qu’on n’est pas au coeur du mystère politique, on se croit un parangon de vertu.