Au départ la compétence est neutre. Elle cherche ses marques dans un monde réglé sur l’axiome de la compétition. Elle veut prouver, se valoriser, être reconnue. On lui suggère souvent le mentorat pour être adoubée et progresser. Elle s’attache alors à un parrain. Et puis un jour, elle se rend compte qu’elle est, comme son mentor, dans une grande matrix calquée sur un agenda plus ou moins secret. Introduite dans le système, la compétence n’a plus le choix. Elle joue sa survie et sa réputation. Faut-il alors pour elle pratiquer « l’intégration subversive » du sociologue suisse Ziegler? C’est-à-dire influencer, changer le système de l’intérieur une fois qu’on y a pris toute sa place ? Vœu pieux de bourgeois gentilhomme ? Le système aime les grandes gueules qui aboient sans mordre. Les grandes gueules, c’est sa caution de légitimité, sa bonne conscience. Allégorie de la trajectoire de la compétence..

Ce ne sont pas des compétences pointues qui manquent à l’Afrique ou à des parties du globe encore en proie à ce qu’une certaine conception du « développement » appelle « retards structurels ». C’est l’agenda pour lequel ces compétences mettent en branle et en réseau leurs intelligences qui pose problème. Quand on écoute les économistes Oscar Melhado ( ancien représentant du FMI en RDC ) et Makhtar Diop ( ancien vice-président Afrique de la Banque mondiale) que j’ai interviewés à Kinshasa en janvier 2015 lors du forum sur l’inclusivité économique organisé par le Premier ministre de Joseph Kabila, Matata Ponyo, on se rend compte qu’ils maîtrisent leur sujet et qu’ils méritent leur place.

Seulement voilà, la Banque mondiale et le FMI ne sont pas dans un pays pour le développer mais pour l’appuyer à la demande du pays qui se soumet volontairement à ses exigences. Les institutions de Bretton Woods sont en mission depuis la fin de la Seconde Guerre mondiale, selon une vision du monde.

Les agendas sont au dessus des compétences. Ils se nourrissent de compétences, les séduisent, les piègent, les pressent, les étouffent pour en faire des légumes en apparat de récital. C’est pourquoi, sur la souveraineté monétaire, le brillant banquier franco-béninois Lionel Zinsou peut affirmer que « le CFA mérite un débat plus sérieux » pour tancer le « populisme » monétaire ambiant alors qu’un autre brillant économiste, le Bissau-Guinéen Carlos Lopes, ne s’explique pas le maintien d’un tel instrument colonial.

On ne peut plus gouverner le XXIe siècle avec des institutions de la moitié du XXe mises en place par les vainqueurs de la SGM. Il n’y a pas de puissance ayant vocation messianique à régner indéfiniment. Il n’y a rien d’immuable sous le soleil.

Il ne s’agit pas de choisir de façon manichéenne entre l’axe du bien et celui du mal. Il ne s’agit pas de se proclamer francophile, américanophile, russophile, sioniste, arabophile, turcophile ou iranophile. Il s’agit de rester soi-même et de tracer en toute liberté sa propre voie en tant que peuple libre.

Zran Fidèle GOULYZIA

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Docteur en Droit international - Ecrivain - Journaliste