Depuis mercredi la statue de Papa Wemba trône fièrement à un carrefour du quartier populaire de Matonge à Kinshasa. Le président congolais, Félix Tshisekedi, a effectué le déplacement pour dévoiler cette belle œuvre d’art devant le regard fier des compagnons d’école du maître de la rumba décédé sur scène le 24 avril 2016 à Abidjan.
Wemba n’a pas vu l’inscription de la rumba congolaise au patrimoine culturel immatériel de l’Unesco en 2021. En 2022, le gouvernement congolais a racheté sa principale résidence située à Macampagne – quartier résidentiel de Kinshasa – pour en faire le « musée de la rumba congolaise ». De très bons points pour Félix Tshisekedi qui semble détenir tous les leviers d’une réélection lors de la présidentielle qui s’annonce dans quelques semaines.
On ne peut pas douter de la volonté de l’actuel chef de l’Etat congolais ou de ceux qui l’ont incarné de cristalliser la conscience collective autour de symboles dans un pays-continent – de plus de 2 millions de km2 pour plus de 100 millions d’habitants – où tout est priorité. En 2015, son prédécesseur, Joseph Kabila, a fait ériger à la Place des artistes un monument à la mémoire de l’immense Luambo Makiadi dit Franco. Ce n’est pas que la villa cossue de Wemba ne se prête pas à un musée. Tous les ingrédients sont réunis pour en faire un lieu de culture et de connaissance. Il peut être le musée Wemba.
La sublimation de la rumba congolaise doit rêver grand avec un vrai modèle structurel économique de financement et de gestion d’un musée national de la rumba qui reflète la volonté de puissance de la RDC. Un musée qui raconte l’histoire de la Rumba en lien avec la déportation des esclaves du Royaume Kongo, l’appropriation de ce rythme de retour de Cuba et des îles, les premières sonorités modernes sous Wendo Kolosoy, les grands orchestres de l’indépendance, la révolution de Zaïko Langa Langa, la féminisation de la rumba et la nouvelle garde du mouvement.
Toutes les grandes nations qui parlent imperium et rayonnement l’ont fait. Pour ce que la RDC représente comme vivier culturel, ce n’est pas trop demander. Il faut sortir des sempiternelles récriminations et des refrains sur ce qu’on ne fait pas pour nous ou ce qu’on a fait contre nous. Il faut entonner un nouveau chant sur notre capacité à faire des choses pour et par nous-mêmes. L’Unesco a fait sa part. Le Congo a les moyens de s’offrir un tel joyau sur ressources propres. La réduction du train de vie de l’Etat peut aider. Tous ces mécènes, ces politiques rentiers, ces hommes d’affaires dans l’industrie minière dont on chante à longueur de journée les fortunes peuvent aider à sortir de ce folklore chronique où les talents ne pensent qu’à rivaliser autour du remplissage du stade des martyrs.
Le second mandat qui pointe à l’horizon, Monsieur le Président, vous en donne l’occasion.
Matondo mingi Mokonzi