« J’ai eu en prison l’occasion de prendre de la distance et de me regarder, ainsi que mon organisation, avec un certain détachement, et de réfléchir très calmement à mes erreurs passées et à mes faiblesses qui se sont révélées dans le cadre de mon travail politique…J’en suis ressorti plus mûr. », Nelson Mandela, Conversation avec Richard Stengel, mars 1993.
Une célébration méritée du héros de la nation arc-en-ciel, icône du pardon et de la réconciliation. Une célébration qui n’empêche pas de questionner l’Histoire.
De terroriste international à héros universaliste, qu’est-ce que Mandela a pu lâcher comme lest ? Pourquoi Mandela et pas Robert Mugabe ? On vous répondra que la sénilité du héros zimbabwéen et sa griserie du pouvoir ont érodé sa propre estime, sans évoquer la réforme agraire – sûrement mal préparée et chaotique – qui a dépossédé de nombreux colons. Qui est-ce qu’on célèbre et qui est-ce qu’on descend ? La même main qui vous élève aujourd’hui vous dépossède de tout, à la moindre contrariété, quand vous n’allez plus dans le sens dicté. Vous pouvez condamner Aung San Suu Kyi sur la base de ce que les médias qui nourrissent votre imaginaire ont rapporté de sa position sur la crise des Rohingyas en Birmanie. Vous pouvez ériger dans votre esprit l’axe du mal et l’axe du bien. L’idéologie qui nourrit votre position sert à justifier ses actes. Elle ne recherche pas la vérité. Ce n’est pas son but.
En 2010, à dix mois du traquenard électoral qui allait le déloger de la présidence ivoirienne, voici ce que Laurent Gbagbo, historien de formation, avait répondu à un papier glacé parisien:
« De 1944 à 1951, Houphouët était considéré comme un ennemi de la France, un communiste, un bouffeur de Blancs. Il est mort en icône de l’amitié franco-africaine…J’ai lu avec attention l’autobiographie de Mandela et je trouve qu’il n’est pas transparent sur la nature des discussions qu’il a eues avec Pieter Botha avant sa sortie de prison. Qu’a-t-il négocié au juste ? Quelles concessions a-t-il faites ? Quand j’entends dire : « Si l’humanité devait se choisir un père, il s’appellerait Mandela », je ne marche pas. Nelson Mandela est un homme politique. Ce n’est pas un mythe. »
À chacun son opinion, dans le respect des morts !