Ils sont nombreux ces observateurs de l’actualité politique africaine qui suivent de près l’évolution de la situation au Togo. En difficulté face à une opposition qu’il pensait tenir jusque-là à sa merci,  le régime de Faure Gnassingbé souffle le chaud et le froid. Entre annonce d’un avant-projet de révision constitutionnelle et diplomatie onusienne, l’homme fort de Lomé fait tout pour ne pas perdre la main. Au moment où 7 millions de Togolais sont privés d’Internet et de SMS, les communicants du régime sont à l’abordage sur les réseaux sociaux. Dans la grisaille, un visage cristallise la rage des internautes togolais proches de l’opposition: celui du représentant spécial de l’ONU pour l’Afrique de l’ouest et le Sahel,  Mohamed Ibn Chambas. Il lui est reproché de naviguer à contre-courant de la volonté populaire, en adoubant l’effet d’annonce résultant de l’adoption en conseil des ministres de l’avant-projet de loi portant révision constitutionnelle.

En  2015, lors du coup d’Etat manqué du Régime de sécurité présidentielle, bras armé du président déchu Blaise Compaoré, les « révolutionnaires » du pays des Hommes intègres avaient fustigé le jeu trouble de la CEDEAO et de l’ONU dont le représentant ne jouait pas franc jeu à leurs yeux.

Dans la crise ivoirienne, Mohammed Ibn Chambas avait été très souvent critiqué par les partisans de Laurent Gbagbo pour qui la logique de l’émissaire de la CEDEAO à l’époque obéissait à un vaste complot international dans lequel il jouait magistralement sa partition.

Sur la même crise ivoirienne, comment comprendre les recommandations du diplomate suédois Pierre Schori, à la tête du Groupe de travail international qui avait suggéré la dissolution de l’Assemblée nationale ivoirienne?

Le renard de Djèrègbé, l’immense Albert Tévoèdjrè, avait essuyé un retentissant revers, de retour d’une mission à Bouaké, épicentre de la rébellion ivoirienne, pour des propos que Laurent Gbagbo n’avait pas apprécié. Sa mission à la tête de l’Opération des nations-unies en Côte d’Ivoire avait tourné court.

Que dire alors du désaveu de la médiation de l’illustre Edem Kodjo poliment écartée par la Conférence épiscopale du Congo à l’initiative de l’accord du 31 décembre 2016 qui a sauvé les meubles au pays de Joseph Kabila?

Les attaques ad personam ne sauraient prospérer dans cette tribune.Aucune ombre de doute sur la compétence de ces personnalités citées qui ont fait leurs preuves sur le continent. Edem Kodjo, Albert Tévoèdjrè et Pierre Schori n’avaient plus rien n’à prouver sur l’échiquier international quand ils étaient à l’oeuvre en RDC et en Côte d’Ivoire.

On ne peut pas dire la même chose pour Ibn Chambas. Il a toute une carrière devant lui.  Ce que les Togolais épris d’alternance lui demandent, c’est de ne pas jouer les bouche-trous d’un régime aux abois, d’avoir l’audace de traduire la réalité du terrain quoi qu’il en coûte.

Le choix d’une carrière onusienne et les tractations diplomatiques ne doivent pas se faire au mépris de la volonté du peuple togolais qui n’aspire qu’à la liberté.

Nourris à la sève de la bureaucratie onusienne et de ses turpitudes, ces technocrates d’une froideur encombrante sont peut-être les vrais fossoyeurs de l’élan démocratique.

Zran Fidèle GOULYZIA

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Docteur en Droit international - Ecrivain - Journaliste

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