Monsieur le Premier ministre,
Monsieur Amadou Ba,
Quelle leçon de démocratie un Ivoirien peut-il donner au Sénégal, terre de stabilité institutionnelle, d’alternance politique, prunelle de l’intelligentsia francophone selon une doxa coloniale ? Aucune. Depuis son indépendance formelle en 1960, mon pays n’a pas eu la chance de voir un ancien président assister à l’investiture de son « successeur ». Pour cela, le Sénégal reste pour nous une exception en Afrique francophone. Une exception dont nous sommes fiers mais qui ne nous fait pas perdre de vue le caractère sclérosé et rentier de son système partisan décadent. Et c’est justement la rupture de cette exception par le président Macky Sall qui m’autorise à écrire ce billet d’humeur. Il y a quelques jours, on a vu le président sénégalais tenir à Boutcha une bougie en mémoire des victimes ukrainiennes dans une mission africaine de paix aux contours flous dont on sait aujourd’hui qu’elle est à l’initiative d’une silhouette bien connue des réseaux françafricains chiraquiens. Une mission à l’attelage bien curieux impliquant des marchands d’armes, des chefs d’Etats pro-russe et pro-ukrainien. Macky Sall a donc enjambé le corps de ces jeunes Sénégalais pour se donner l’image internationale d’un président qui maîtrise la situation chez lui. Le calme est revenu à Dakar. C’est ce que nous souhaitons pour le peuple frère sénégalais. Mais la répression sourde et aveugle continue en silence. Personne n’oubliera les images de miliciens tirant avec des fusils d’assauts aux cotés de la police sénégalaise. Personne n’oubliera cet adolescent pris comme bouclier humain par les forces de l’ordre. Les règles élémentaires du maintien de l’ordre public ont été bafouées. « Le pays ne peut pas être bloqué pour et par une seule personne. D’ailleurs il n’a pas encore la carrure pour gouverner ». D’accord, dans ce cas, c’est au peuple de choisir dans une compétition électorale saine et ouverte, pas en instrumentalisant la justice sénégalaise et en déséquilibrant le pouvoir de coercition de la force publique, loin des sentiers républicains. L’équilibrisme et la nuance qui consisteraient à rejeter les torts de part et d’autre ne sont pas mes premiers atouts. La rupture de l’exception sénégalaise est du fait du président Sall. En tant que dauphin putatif de la majorité présidentielle, vous avez encore sept mois pour le convaincre de trouver une porte de sortie honorable. En espérant que la tendre texture de la viande de tabaski de cette dernière année de la gouvernance Sall fasse son effet !
Respectueusement
Un Farafinois libre !

Zran Fidèle GOULYZIA

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Docteur en Droit international - Ecrivain - Journaliste

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