Un ami m’a demandé pourquoi je me présentais comme « ancien journaliste ». Parce que je ne tire plus mes revenus de ce métier, et que je n’ai plus envie de relayer des infos auxquelles je ne crois pas (plus). Même si on reste journaliste dans l’âme toute sa vie.

Radio Amitié Yopougon, échec au casting de Radio Côte d’Ivoire ( 2007) , Radio Atlantique et Elit FM, échec au casting de Radio Nostalgie Abidjan,( 2008) Alerte Info ( Abidjan, San Pedro, Cotonou), LC2 Télévision grâce à Patrice Louis du journal Le Monde, Afrikatv et des piges indirectes pour Vox Africa, Africable et CGTN français ( la chaîne officielle chinoise).

Des souvenirs foisonnent dans mon esprit. La couverture de la présidentielle au Togo en février 2010, la présidentielle béninoise d’avril 2011, les coulisses de la CAN 2012 à Cotonou pour LC2/ Afnex, la présidentielle d’avril 2016 en Guinée équatoriale, la quinzaine de voyages au Congo-Brazzaville entre 2012 et 2016, la traversée du fleuve Congo par le beach de Brazza, l’interview de Papa Wemba à son QG de Kasavubu à Kinshasa, la couverture de la fête de la liberté à N’Djamena et l’interview du Premier ministre Emmanuel Nadingar, les interviews de Thierno Monénembo, Tiken Jah et Dibango à Cotonou, l’interview de Malika Bongo à Librevillle, l’interview de Roland Lumumba à Abidjan, celle de Richard Attias à Brazzaville, survoler Brazzaville – Sibiti dans le jet privé d’un officiel congolais, la couverture du sommet mondial des femmes présidents de parlement à Abu Dhabi aux Émirats arabes unis…J’en oublie..

Ce n’est pas interroger des personnalités qui m’a le plus marqué. C’est le souvenir du contact humain. Par exemple, en tant que chef d’édition, préparer en off le squelette du script pour le prompteur, nouer et ajuster la cravate du présentateur-vedette des JT du week-end de LC2 Télévision, Steev Hondjo. Passer un mois en forêt équatoriale auprès des populations rurales congolaises. Apprendre de la résilience du peuple malien dans les rues de Bamako, après l’attentat du Radisson Blu en novembre 2015. Ça ne s’oublie pas.

Ces expériences m’ont permis de comprendre des choses. Par exemple, que sur le continent. le journalisme se pratiquait encore dans la précarité. Les patrons d’entreprise de presse tirent leur épingle du jeu grâce à leurs connexions avec le monde politique et celui des affaires. Mais les journalistes crèvent dans le dénuement. Pourquoi un journaliste payé à 100.000 FCFA ( 150 euros) au mépris de conventions collectives existantes reste-t-il au sein d’une rédaction pendant des années? Parce que hors du système, hors de la rédaction, hors antenne, il ne représente plus rien et son téléphone cesse de sonner. Il est vite oublié.Il y a quelques semaines, une présentatrice congolaise de la Télévision nationale est décédée des suites d’une agression par des kulunas ( versant des microbes ivoiriens). Elle cherchait à rentrer à moto-taxi après avoir présenté le dernier JT de 23h. Inadmissible et révoltant.

Dans ce métier, il faut se battre avec ses propres armes et laisser parler son travail. Ne rien attendre de personne parce que les connexions et opportunités ne viennent jamais là où vous pensez qu’elles viendront. Ils ne sont pas nombreux les devanciers et confrères qui ont une âme de passeur. Beaucoup de ceux qu’on admire à l’écran ou à l’antenne ne conçoivent la lumière pour eux et par eux. Ils savent ce que vous faites et ce que vous valez mais ils vous snoberont par complexe de supériorité ou d’infériorité.

C’est d’ailleurs ce complexe d’infériorité qui fait croire à certains officiels africains que faire du branding pays pendant 5mn sur TF1 pour  » booster » le tourisme est un exploit à conter aux générations futures, alors que le montage financier de telles opérations profitent à des boîtes de com et à un cabinet de l’ombre. Il y a quelques années, un confrère m’a soufflé le montant d’une opération de branding du Burkina Faso sur Euronews goupillée par un patron de presse proche de Compaoré et Kaboré. Tout simplement ahurissant. Journalisme et communication, une relation incestueuse qui a encore de beaux jours devant elle. Heureusement que le journalisme mène à tout à condition d’en sortir….

Zran Fidèle GOULYZIA

About Zran Fidèle GOULYZIA

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Docteur en Droit international - Ecrivain - Journaliste