Demain est jour de festivités chez moi. Mon pays célèbre le 64è anniversaire de son accession à la souveraineté. Faire une pause pour savourer les progrès, même les plus petits, dans la marche d’une nation en construction, est essentiel. Savourer mais aussi questionner le sens de notre marche commune.

J’ai retrouvé mon interview avec Tiken Jah fin juin 2010 à Cotonou. En 2010, les pays africains dits francophones célébraient le cinquantenaire des indépendances octroyées par l’Empire français. Tiken était réfugié au Mali. La rébellion des forces nouvelles imposait encore sa loi dans le Nord. Le quotidien ivoirien « Le Patriote », canard historique du RDR alors dans l’opposition, avait repris mon interview, barrant à sa manchette:  » Depuis Cotonou, Tiken Jah charge : « le peuple ivoirien est pris en otage ».

Morceau choisi de cette interview: « C’est la photocopie de l’indépendance qu’on nous a donné. La vraie copie de l’indépendance reste à réclamer. » L’unanimité semble se faire sur le constat. Quant aux moyens pour y parvenir, les Africains restent très divisés. Certains préfèrent une douce collaboration dont les termes sont dictés de façon opaque par l’ancienne puissance tutélaire ; d’autres militent pour une rupture frontale. L’auto-nuisance est la chose la mieux partagée entre Africains, sous le regard amusé de l’ancienne puissance tutélaire qui a promis de faire payer leur outrecuidance à tous les dirigeants qui l’ont mise à la porte sans ménagement.

14 ans après cette interview, ironie de l’Histoire, le Mali est en proie à une belligérance d’usure imposée et visant à lui faire payer ses choix stratégiques.
La Côte d’Ivoire est sortie d’une phase de belligérance latente. Elle a amorcé une reconstruction remarquable. Le béton fait le fier à Abidjan sans procurer le bien-être social qu’on était en droit d’attendre de l’embellie infrastructurelle.

Pour ma part, à la veille du 7 août, je partage ce bout de Camus prononcé le 10 décembre 1957, à la remise de son Nobel de littérature.
« Chaque génération, sans doute, se croit vouée à refaire le monde. La mienne sait pourtant qu’elle ne le refera pas. Mais sa tâche est peut-être plus grande. Elle consiste à empêcher que le monde ne se défasse. Héritière d’une histoire corrompue où se mêlent les révolutions déchues, les techniques devenues folles, les dieux morts et les idéologies exténuées, où de médiocres pouvoirs peuvent aujourd’hui nous détruire mais ne savent plus convaincre… »
Excellente célébration à ma Terre et aux miens !

Zran Fidèle GOULYZIA

About Zran Fidèle GOULYZIA

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Ancien journaliste reporter - Ecrivain - Juriste internationaliste