Ce n’était donc pas un poisson d’avril. Pour la première fois de son Histoire, la RDC a une femme Premier ministre. La nouvelle a été quelque peu noyée dans le flot médiatique suscité par l’investiture du jeune président sénégalais.

Comme Lumumba, Wa Dondo…Matata Ponyo ou encore Sama Lukonde, Judith Siminwa Tuluka aura droit à son buste au mythique Jardin des Premiers à Kinshasa. Jardin que j’ai eu le privilège de fouler dix ans en arrière, invité par le cabinet du Premier ministre Matata Ponyo ( le technocrate à l’éternelle cravate rouge) à produire avec mes collègues béninois d’Afrikatv une série de reportages sur « la révolution de la modernité », slogan cher au très froid Joseph Kabila.

La désignation d’une femme Premier ministre n’est pas une révolution en soi. j’ai arrêté de me fondre dans le discours dominant qui voit dans la féminisation du centre nerveux décisionnel des Etats une panacée. Je regarde à l’agenda global pour lequel une femme est coptée dans le secret et élevée en dignité. Une certitude, l’ancienne ministre du Plan a le profil pour le job. Sa nomination relève d’une communication politique réussie pour le parti du président.

La bureaucratie congolaise est partagée entre soulagement et inquiétude, après avoir passé cinq semaines à gérer les affaires courantes suite à la démission sans surprise en février dernier de Sama Lukonde. Une période de ruissellement administratif s’ouvre avec son cortège de nominations, d’affectations fantaisistes et de récompenses partisanes au sein de la coalition au pouvoir. Certains bureaucrates ne rêvent que d’une chose: reprendre leur train de vie dispendieux à moins que Madame Siminwa ne leur coupe l’herbe sous le pied.

Avec une majorité confortable au Parlement, la gouvernance Tshisekedi échafaudée autour de la coalition « L’ Union sacrée » a les mains libres pour imprimer au Congo un élan nouveau.

Mais voilà, le premier mandat du fils Tshisekedi, en dépit de bons points macro-économiques liés à une croissance soutenue du secteur minier ( les résultats des réformes du code minier engagées sous l’Administration Ponyo sont perceptibles), s’est enlisé dans un péché congénital propre à une conception « trop congolaise » de la chose publique. Cette conception est entretenue par une classe politique devenue rentière insolente et messianique, au détriment d’un pays-continent où plus de 100 millions de personnes subissent une pauvreté endémique. Par deux fois, la Cour des comptes a épinglé la gouvernance financière Tshisekedi pour des dépassements budgétaires.

Ce n’est pas la volonté de bien faire qui manque au président Tshisekedi. Mais il n’a pas encore réussi à rompre avec cette tradition gargantuesque et fastueuse de la gestion des deniers publics en RDC.

Son second mandat à fort relent sécuritaire face à « l’ennemi » rwandais pourrait faire oublier cette obligation de reddition des comptes. Paradoxalement, Félix Tshisekedi semble le meilleur profil de transition pour faire entrer la RDC dans sa destinée d’épicentre d’une fulgurance économique continentale que plus rien ne pourra arrêter.

Zran Fidèle GOULYZIA

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Docteur en Droit international - Ecrivain - Journaliste